« Habiter demain » : une étude présentée par Aude Pringault, ancienne Directrice Prospectives & Stratégie à la Fédération nationale des Caisses d'Epargne
Lors de son Conseil d’orientation du 10 octobre 2024, le Labo de l’ESS a donné la parole à Aude Pringault, alors Directrice Prospectives & Stratégie à la Fédération nationale des Caisses d'Epargne. Retrouvez sa présentation de l’étude « Habiter demain » de 2024 dans le cadre du dossier du Labo de l’ESS de janvier 2025 dédié à la place de l’ESS dans le secteur du logement !
Cette étude entre en cohérence avec une réflexion menée au sein de 15 Caisses d’Epargne sur leurs domaines d’impact. Le logement est ainsi apparu comme un domaine largement partagé. Il est également un secteur dans lequel les Caisses d’Epargne ont une légitimité historique et un leadership. C’est enfin un domaine largement reconnu comme un levier dans les transitions de la société qui peut encore être le terrain d’innovation sociale.
L’étude s’appuie sur un trépied : une enquête terrain réalisée auprès de 5000 habitants et 5000 locataires d’Habitat en région, avec une photographie par région ; un recueil de données clés ; des entretiens avec des experts, qui ont pu commenter nos résultats (universitaires, professionnels de l’immobilier etc.).
L’enquête se compose de trois grandes parties : d’abord un état des lieux du logement aujourd’hui et comment les Français perçoivent leur habitat, une réflexion sur l’habitat demain, et enfin un examen des nouveaux dispositifs de financement des résidences principales.
Le logement aujourd’hui
Sur l’habitat aujourd’hui, on constate que les Français ignorent le diagnostic de performance énergétique de leur logement : seuls 50 % d’entre eux disent le connaitre mais ont alors tendance à la surestimer. Si on en croit leur réponses, 12 % des propriétés seraient classées en A, donc très vertueuses, et les passoires énergétiques (F et G) seraient très minoritaires, de l’ordre de 5 %. Les résultats officiels de l’Ademe nous donnent une vision de la performance énergétique du parc immobilier quasi inversé : 15 % d’habitations classées F ou G ; et seules 2% en A.
Cela veut donc dire que les personnes n’ont pas conscience des enjeux environnementaux de leurs logements et de la consommation énergétique qui en découle, et ainsi des travaux qui devraient être faits pour mettre en conformité les logements.
De même, quand on demande aux Français ce qu’est leur logement idéal, en question ouverte on retrouve la vision traditionnelle du pavillon, spacieux, lumineux et proche des commerces. A l’inverse, le logement « cauchemar » est un appartement étriqué dans une tour, mal isolé, éloigné des commodités, sans espace extérieur : on voit là une référence aux logements sociaux des années 70 dans les grandes tours, en périphérie. Il y a donc un grand décalage entre les enjeux climatiques et environnementaux et une méconnaissance, voire beaucoup de stéréotypes, sur le logement social aujourd’hui.
L’habitat de demain
Concernant l’habitat de demain, les Français plébiscitent les services associés à leur logement au sein de leur résidence ou en immédiate proximité. Ils souhaiteraient en particulier pouvoir partager des espaces extérieurs ou des équipements sanitaires ou sportifs. Ceci est particulièrement vrai chez les jeunes.
Devenir propriétaire reste un idéal pour 57 % Français qui ne le sont pas encore, et il l’est surtout pour 81 % des jeunes répondants. Ce résultat confirme celui de l’enquête menée par la FNCE sur la jeunesse en 2023 : à la question « c’est quoi réussir sa vie », « être prioritaire de son logement « arrivait en seconde position d’élément de réussite, après « avoir un métier passion ».
Pour répondre aux souhaits de Français de devenir propriétaires, alors que nombre d’entre eux sont freinés par des difficultés d’accès au crédit, de nouvelles formes d’accession à la propriété ont vu le jour, comme la LOA, le viager ou encore la dissociation entre bâti et foncier, etc. Ces solutions restent toutefois incomprises du grand public. Seul le leasing immobilier, en raison notamment de sa proximité avec la LOA automobile, semble pouvoir séduire. Il faudra donc fournir un énorme effort de pédagogie pour faire connaitre ces solutions alternatives.
Les enseignements de l’étude « Habiter demain »
On peut donc retenir quelques grands enseignements :
Un décalage conséquent persiste entre les aspirations des Français et les enjeux de transition
L’étiquette énergétique est surestimée, ce qui freine les travaux de rénovation
De nouvelles formes d’habitat peinent à séduire
Les services associés au logement ont particulièrement le vent en poupe
Les nouvelles formes de financement pourraient être une piste à mieux exploiter
Le télétravail pourrait entrainer la proposition d’offre de logement de service pour nourrir la marque employeur des entreprises
Enfin, 4 grands défis ont été identifiés avec l’aide des experts interrogés dans le cadre de cette étude :
être en capacité de proposer une offre de logement décent et abordable, et intégrer le cout d’usage dès la conception des logements
adapter l’offre de logements aux spécificités des territoires et à leur composition démographique, qui ont des besoins de logement différents d’un territoire à l’autre
relever le défi de la transition énergétique en allant vers plus d’impact neutre dans les nouvelles constructions
innover en inventant de nouvelles formes du vivre-ensemble, en favorisant l’habitat inclusif, le lien social. Les acteurs et les solutions proposées par l’ESS peuvent être une piste à mieux exploiter.
Le Labo de l’ESS remercie chaleureusement Aude Pringault pour cette présentation !
Egalement dans le dossier du Labo de l'ESS dédié au logement :