La Plateforme des acteurs pour le ré-emploi des éléments de construction
Cette initiative inspirante a été réalisée dans le cadre d’un projet en partenariat avec l’ESCP, c'est pourquoi le format est un peu différent. Le Labo de l’ESS a accompagné en 2021 un groupe d’étudiantes pour la réalisation d'un travail d’analyse sur l’ESS en Europe, plus précisément en Allemagne et en Belgique. En plus du mémoire, que le Labo a synthétisé sous forme de décryptage, le groupe a interviewé trois initiatives inspirantes européennes : retrouvez l’une d’entre elle ci-dessous.
BELGIQUE
Une plateforme solidaire créée par les acteurs de la construction !
Créée en 2017, la Plateforme des acteurs pour le réemploi des éléments de construction est une initiative basée dans la capitale belge regroupant tous les acteurs de l’industrie du bâtiment engagés dans le développement d’une économie circulaire pour les composants de construction.
Réellement ancrée dans l’économie sociale et solidaire et pilotée par la Confédération de la Construction Bruxelles-Capitale, cette plateforme gratuite centralise les initiatives existantes dans le secteur et permet aux utilisateurs d’échanger avec divers profils : architectes, entrepreneurs, fabricants, etc. Forte de 1 500 membres, elle rassemble, met en lien, informe sur l’économie circulaire et partage l’ensemble des informations sur le réemploi des matériaux de construction.
Actuellement, une à deux personnes travaillent pour la gestion de la plateforme, dont Alexia Meulders, consultante en économie circulaire pour la Confédération de la Construction Bruxelles-Capitale. Elle est chargée, à travers la rédaction d’articles et la création de nouveaux partenariats, de sensibiliser au développement du recyclage dans l’industrie de la construction.
Réemploi Construction Bruxelles : recycler, réemployer, préserver l’environnement
Le projet Réemploi Construction Bruxelles et sa plateforme sont nés du constat que le secteur de la construction produisait un nombre très important de déchets sans qu’ils soient pris en compte ou ré-utilisés. Comme le souligne un rapport réalisé par le cabinet Deloitte en 20151, les déchets liés à la construction et à la démolition dans le pays n’étaient ni répertoriés ni recyclés jusqu’en 2012, et les données disponibles sur le sujet sont collectées tous les deux ans seulement.
En 2010, on dénombrait ainsi un total de près de 9 millions de tonnes de déchets liés au secteur de la construction, contre moins de 7 millions en 2012. Cette même année, 14 millions de tonnes de déchets liés à la construction ont pu être recyclés. Ces chiffres démontrent l’impact de la mise en place d’actions relatives à la gestion des déchets à l’échelle nationale. C’est ce contexte favorable qui a permis à des initiatives comme la Plateforme pour le réemploi des éléments de construction d’être reconnues et soutenues par l’administration bruxelloise, notamment par Bruxelles Environnement2, qui cherchait à concilier création d’emplois locaux et réduction des émissions de CO². La majeure partie des déchets issus du secteur de la construction étant encore exportée hors de la région, le travail de la plateforme pour développer le réemploi permet effectivement de créer des emplois locaux, comme un « effet de bord » positif.
Des difficultés à surmonter pour favoriser l’économie sociale et solidaire dans le secteur de la construction.
Comme dans toute bonne histoire, le projet s’est heurté à quelques difficultés, la première, règlementaire, relevant du positionnement de la main d’œuvre subventionnée dans le secteur de la construction.
Légalement, la plupart des employés du secteur de la construction à Bruxelles relèvent de la « Commission paritaire 124 » (comme une convention collective), qui stipule que leur salaire est fixé par négociations sociales. Les coûts supplémentaires inclus dans les salaires, comme l’assurance ou les taxes sociales, représentent des frais très élevés pour les entreprises de la construction.
Or, l’économie sociale et solidaire dépend d’une commission paritaire différente, subventionnée par le Gouvernement afin de soutenir l’emploi de personnes défavorisées. Employer des travailleurs subventionnés permet ainsi de diminuer les coûts des projets de construction, d’autant que les entreprises qui nouent des partenariats avec des structures de l’ESS bénéficient d’une aide financière du gouvernement.
Le problème émerge donc lorsque deux salariés occupant un poste identique bénéficient de salaires différents. Un des objectifs de la Plateforme des acteurs pour le réemploi des éléments de construction est donc également de tenter de répondre à ces défis en favorisant les échanges autour de ces problématiques.
Sur le plan financier, l’initiative manque de ressources, notamment pour mesurer efficacement l’impact de la plateforme sur le secteur de la construction dans la région bruxelloise.
Malgré les difficultés, cette initiative démontre bien l’intérêt de ce type de plateforme et de leur potentiel de développement. La démarche ascendante et la coopération entre les secteurs privés et publics semble être cruciales pour faciliter l’acceptation du public et apporter de la stabilité au projet. Si cette initiative était seulement initiée par les pouvoirs publics, le secteur de la construction n’aurait sans doute pas été aussi actif. Cela aurait également pu entraîner des conflits d’intérêts. Une nouvelle fois, la participation de toutes les parties prenantes dans la mise en place d’un tel projet est garante de sa durabilité.
Crédits photos : Unsplash
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