André Dupon
Social-business et entreprise sociale : une vision partagée, des chemins différents
Le « Social Business Hub » (SoBizHub) a été lancé à l’occasion du dernier World Forum de Lille. Je me réjouis de cette initiative régionale qui invite les entreprises privées, principalement des grands groupes, à co-construire des réponses concrètes alors qu’en France, le chômage déferle, la précarité et l’exclusion s’amplifient, les inégalités sociales s’accroissent, le gaspillage alimentaire s’intensifie, les ressources énergétiques s’épuisent.
Développés d’abord dans les pays dits « du sud », ces social business visent un impact social et respectent les principes « sans perte, ni dividende » chers au Professeur Muhammad Yunus, Prix Nobel de la Paix et fondateur du social business. Ces actions sont cependant développées en marge du cœur d’activité des entreprises classiques. Authentiques ou cosmétiques, elles n’en restent pas moins périphériques. C’est l’une des différences majeures avec les entreprises sociales.
Président du MOUVES qui regroupe en France près de 400 entrepreneurs à la tête d’entreprises sociales de toute taille, je rencontre chaque jour de nouveaux dirigeants qui mettent leur expertise, leur capacité d’innovation, leur énergie et leur projet entrepreneurial au service exclusif d’une finalité sociale ou environnementale : emploi, inclusion, préservation de l’environnement, accès au logement, aux soins… tout en respectant des critères très exigeants : rentabilité limitée, bénéfices réinvestis, gouvernance désintéressée, échelle des salaires encadrée…, reconnus par la récente Loi en faveur de l’Economie Sociale et Solidaire. Cette nouvelle génération d’entrepreneurs sociaux, issus principalement des grandes écoles et des universités, rejoint ainsi les dirigeants d’entreprises sociales pionnières. Celles qui, depuis près de 30 ans, comme le Groupe VITAMINE T qui a très tôt noué avec les entreprises privées des alliances ambitieuses, concilient efficacité économique et intérêt général.
Restons lucides, les entreprises n’ont pas pour objectif premier la maximisation d’un profit social, et c’est bien légitime. Elles ne sont pas et ne deviendront pas toutes demain des entreprises sociales même si le contexte actuel les incite, à juste titre, à remettre l’Homme au cœur de leur projet.
Mais cette prise de conscience, cette forme d’ « empowerment » sur la question sociale est la bienvenue car, face à l’ampleur des défis de notre temps, personne ne détient seul les clés pour apporter des solutions efficaces. Ni les pouvoirs publics dont les marges de manœuvre budgétaires se réduisent sensiblement, ni les entreprises sociales dont le changement d’échelle reste à produire, ni les entreprises privées dont la finalité reste le profit économique.
L’intense développement de l’entrepreneuriat social, dont le MOUVES est le témoin majeur, est une réponse moderne et une promesse d’avenir, entre les berges de plus en plus étroites de l’intervention publique et de l’action des opérateurs économiques.