La "nouvelle vie" des prisons de Lyon, vers un habitat intergénérationnel
La reconversion des prisons de Lyon, en centre-ville, est au cœur du projet "Vie grande ouverte". Le site doit accueillir l’Université catholique de Lyon, des bureaux et des commerces, du logement en accession à la propriété, du logement social, un programme de logement intergénérationnel - accueillant étudiants et personnes convalescentes sortant de l’hôpital - et un centre de recherche.
Après la désaffectation des prisons Saint-Joseph et Saint-Paul en 2009, l’Etat lance un appel à idées pour la reconversion de ce patrimoine lyonnais 1 : il souhaite susciter des projets exemplaires tant sur le plan architectural que sur le plan environnemental, et dans le respect de cet ensemble du XIXème siècle composé de deux îlots. C’est dans ce contexte que le Projet "Vie grande ouverte" est retenu ; il réunit l’Université Catholique de Lyon, le Mouvement Habitat et humanisme et la Pierre Angulaire via leurs sociétés foncières, l’OPAC du Rhône et le Groupe immobilier SOFADE/OGIC.
Un lieu d’humanité ouvert, inventant de nouvelles relations citoyennes et favorisant l’intergénérationnel
Ce projet fait du site un ensemble hors normes, lieu d’humanité inventant de nouvelles relations citoyennes entre des populations différentes. Il se veut un lieu ouvert sur la cité pour y faire entrer la vie sous toutes ses formes :
- Le Savoir, avec la présence de l’Université Catholique et de ses Instituts de recherche sur 35 000 m2 (sur la totalité de l’ilot Saint-Paul) ;
- L’Economie, avec l’implantation de bureaux (10 000m2) et de commerces (700m2) ;
- La Vie privée, à travers 90 logements en accession à la propriété et 65 logements sociaux locatifs (OPAC) ;
- La Vie Fragile et la jeunesse, avec l’accueil de personnes convalescentes et isolées, accompagnées et prises en charge par des étudiants, logés sur place. Ce volet du projet "Vie Grande Ouverte" est mené par Habitat et Humanisme et La Pierre Angulaire via leurs foncières. Il s’agit de répondre aux nouveaux défis posés par les problématiques croisées de la précarité, de l’isolement, et des fragilités liées à l’âge ou aux accidents de la vie. Un projet emblématique pour un mouvement associatif engagé de longue date dans la recherche et la mise en œuvre de solutions pour une société plus humaine et plus juste.
Mêler vie fragile et jeunesse : une belle expérimentation en matière d’innovation sociale
La volonté de mêler la vie fragile et la jeunesse est née d’un double constat. D’une part, la difficulté croissante des jeunes à se loger dignement au cœur de la cité, multipliant les situations d’isolement. D’autre part, la nécessité de proposer une solution d’hébergement préparant le retour à domicile des personnes après une hospitalisation. Avec une durée moyenne d’hospitalisation de cinq jours, se sont développés des services de soins et d’hospitalisation à domicile. Mais quand le logement est inadapté ou lorsque la personne est isolée, ces dispositifs se révèlent difficiles voire impossibles à mettre en œuvre. Avec le soutien des soignants, une alternative au domicile est proposée pour les patients qui, au sortir de l’hôpital, sont confrontés à une grande solitude.
Cet accueil temporaire prépare le retour à domicile, en tenant compte des situations de vulnérabilité. Les étudiants seront appelés à prendre soin des personnes convalescentes dans les actes de la vie quotidienne (prises de rendez-vous, par exemple avec le médecin ou l’infirmière, courses…). C’est dans ce cadre que sera réalisé un ensemble d’habitats intergénérationnels de 1105 logements dont 90 pour des étudiants et 20 conçus pour l’accueil de convalescents, ainsi qu’un centre de soins ouvert également aux personnes du quartier. Et, pour répondre à l’urgence d’une réflexion à partir des savoirs et des pratiques, les "Ateliers de l’Entrepreneuriat Humaniste" seront mis en place en partenariat avec l’Université Catholique. Ces ateliers auront une vocation de recherche et pourront être un incubateur de projets innovants. S’inscrivant dans le champ universitaire et des responsabilités d’entreprises, ils devront énoncer des propositions.
Le chantier doit être livré en 2015. C’est un projet qui marque une véritable innovation sociale ; Entreprendre pour Humaniser la Dépendance la Foncière de La Pierre Angulaire a d’ailleurs reçu le prix national Convergences 2015 en septembre dernier pour ce projet mené en partenariat avec Habitat et Humanisme. Le nouveau destin des prisons lyonnaises - qui les fait passer d’un lieu d’enfermement à des espaces urbains ouverts - traduit bien concrètement une transformation sociale possible avec la mise en place d’un projet émanant de structures associatives et d’entreprises solidaires, financé en partie par l’épargne solidaire. Ou comment tisser du lien au travers d’un projet architectural à visage humain.
- 1Ces prisons sont toutes deux classées "monuments historiques". La première, Saint-Joseph, a été construite par Louis-Pierre Baltard vers 1825 ; elle est conçue comme "une prison de la rédemption". La prison Saint-Paul, construite par Antonin Louvier en 1860, est "une prison expiation".