Commown, la Licoorne de l’électronique responsable
Alors que l’on parle de plus en plus de l’impact environnemental des appareils électroniques (du point de vue de leur production et de leur utilisation), les entreprises et les particuliers cherchent davantage à s’équiper en ordinateurs ou smartphones plus écologiques. La SCIC strasbourgeoise Commown propose pour ces produits des solutions exigeantes, éthiques et écologiques, ainsi qu’une véritable réflexion sur notre consommation électronique.
Appareils réparables et en bien commun
Fondée en 2018 et forte d’une équipe d’une vingtaine de personnes aujourd’hui, Commown déploie ses services électroniques dans toute la France, en Belgique et depuis peu vers l’Allemagne. A destination des professionnels comme des citoyens, son offre comprend des ordinateurs (fixes et portables), des téléphones et des accessoires audio, soit plus de 2 000 appareils mis en circulation au total. Leur particularité : les produits sont triés sur le volet en termes éthique et écologique, à l’image des téléphones Fairphone dont l’or est labellisé Fairtrade. Ainsi, Commown contribue au prolongement de la vie des appareils en les choisissant réparables, si possible chez soi, et en proposant une prise en charge des pannes sans limite dans le temps. Résultat : on lutte concrètement contre l’obsolescence et on renouvelle moins souvent ses appareils. Selon l’ADEME augmenter l’usage d’un ordinateur de 2 à 4 ans permettrait d’améliorer de 50 % son bilan environnemental.
Autre principe essentiel mis en œuvre par Commown : la location longue durée. Les appareils ne sont pas vendus aux clients, mais mis en location. Au-delà de l’intérêt écologique, chaque client a un intérêt financier à garder son appareil le plus longtemps possible : son abonnement mensuel est dégressif au fur et à mesure des années. A titre d’exemple, l’abonnement mensuel d’un Fairphone au bout de cinq ans ne représente plus que 40 % de la mensualité d’origine.
La flotte de l’ensemble des appareils appartient aux sociétaires de la coopérative, appelés Commowners : c’est une flotte en bien commun, pour laquelle les sociétaires ont également intérêt à ce que la durée d’utilisation soit la plus longue possible. Dans les faits, la flotte commune est aussi « un moyen de prolonger la durée d’exploitation des composants », explique Adrien Montagut-Romans, co-fondateur de Commown, « c’est un réservoir dans lequel nous pouvons piocher des pièces issues d’appareils qui ne sont plus réparables, pour bricoler ceux qui le sont encore et ainsi allonger leur durée de vie. »
Low-tech et sobriété électronique
Les enjeux de l’impact écologique de l’électronique sont au fondement des réalisations de Commown. La réparabilité fait directement écho aux réflexions et au plaidoyer autour de la low-tech, dans lesquelles la coopérative est très engagée. « Aujourd’hui, l’électronique n’est pas du tout low-tech », regrette Adrien Montagut-Romans, « et pourtant, on observe à quel point ce changement est essentiel, par exemple avec les récentes tensions sur les matières premières de l’électronique. »
Qu’est-ce que la low-tech et comment peut-elle éclairer nos choix pour l’avenir ? « La low-tech, c’est le fait que les personnes puissent reprendre en main leur outil. Pour l’électronique, ce serait de pouvoir réparer ses appareils soi-même et même en créer, simplement et chez soi par exemple » : un mouvement à rebours de la production d’appareils que les consommateurs ne peuvent que mettre au rebut lorsqu’ils ne fonctionnent plus.
Ce récit désirable d’avenir low-tech, directement lié au développement des Communs, est aussi une nécessité : un avenir électronique nettement plus sobre, où des ordinateurs robustes et réparables seront mutualisés dans des lieux de sociabilité locaux, est aussi un avenir qui prend le contre-pied des « tendances actuelles vers la miniaturisation et l’usage intensif des smartphones, des tendances qui risquent de créer une fracture numérique bien plus sévère au sein de la société, dès lors que les matières premières seront moins accessibles », développe Adrien Montagut-Romans. Pour Commown, l’avenir low-tech reposera sur l’anticipation des possibilités de réparation à grande échelle, le développement des biens communs logiciels et électroniques, et la relocalisation de la production.
Faire poids et faire système avec les Licoornes
Constituée en SCIC, Commown a pour sociétaires les porteurs de projet initiaux et des salariés, des clients souhaitant devenir sociétaires (soit environ un quart d’entre eux actuellement), des soutiens financiers ou en visibilité, des producteurs et productrices d’appareils électroniques responsables et des bénévoles. On compte parmi eux des coopératives partenaires, telles qu’Enercoop ou Railcoop. Commown porte, comme les autres Licoornes, fièrement le statut de SCIC et les valeurs de coopération interne et externe qu’il promeut.
Le groupe des Licoornes a été créé à l’été 2021 par neuf coopératives françaises. Leur but : montrer qu’il est possible d’accéder aux services de la vie quotidienne exclusivement auprès de sociétés sociales et solidaires (téléphonie, électricité, électronique, covoiturage, etc.) et surtout créer les conditions de coopération entre ces acteurs pour construire un système économique entièrement coopératif. Commown est une des neuf Licoornes et travaille sur ces enjeux stratégiques avec ses pairs.
Un jalon important est posé quelques mois après la création des Licoornes avec la mise en place d’une offre commune pour la téléphonie, proposée conjointement par Commown et Telecoop, opérateur téléphonique écologique et solidaire. L’offre TeleCommown propose une réduction sur les factures des clients qui souscrivent conjointement aux services des deux coopératives : location d’un téléphone et forfait téléphonique. A l’image de l’offre commune entre Commown et l’outil de financement participatif de la Nef, Zeste, ces coopérations inter-SCIC ont vocation à se développer et à proposer à l’avenir des formules en coopération de plusieurs Licoornes. Une façon de faire connaître les services des Licoornes mais également de montrer qu’elles font système et qu’elles peuvent ainsi changer radicalement l’économie.