Tribune
Publié le 6 décembre 2022
Claude Alphandéry

Claude Alphandéry        

Fondateur et président d'honneur du Labo de l'ESS

Claude Alphandéry : 100 ans de résistance au service de la coopération

En cent ans de vie, j’ai vécu deux périodes lourdes d’horreur et de souffrance :

  • En 1940, l’effondrement de mon pays, une défaite radicale, un asservissement implacable ;
  • Depuis la fin des années 70, des crises successives moins foudroyantes, plus insidieuses, mais tout autant destructrices.

Dans les 2 cas, les maux endurés impulsent des résistances :

  • A la fin de la guerre, en 1943-44, les maquis contribuent à la victoire et simultanément à la démocratie sociale par le programme du Conseil National de la Résistance.
  • Aujourd’hui, des actions sociales, solidaires et durables réparent ou réduisent les effets délétères d’une économie engagée dans une compétition sans frein vers des profits financiers sans limite. Elles proposent une sortie de crises par un modèle économique plus respectueux de la nature et de l’humain.

Les entreprises engagées dans cette nouvelle résistance se multiplient, mais sont encore trop fragmentées pour créer un mouvement puissant et mobiliser l’opinion vers une économie alternative.  Certaines initiatives vont néanmoins plus loin : des entrepreneurs s’engagent peu à peu dans des expériences de coopération élargie et complexe. Ils nouent des projets communs autour d’activités généralement distinctes, forment des partenariats inattendus, créent des circuits d’échange inhabituels, et ainsi renouvellent radicalement leur mode de production.

Le Labo de l’ESS est né il y a 12 ans en lien, et pour conforter ces expériences. Il les repère, les scrute, analyse leurs méthodes, leurs moyens, leur situation sur le marché. Il évalue et met en lumière les bénéfices monétaires et existentiels, immédiats et à plus long terme que l’on peut en tirer. Il étudie également les difficultés rencontrées : au sein de leurs entreprises, des désaccords de méthode voire des conflits d’intérêt à surmonter ; à l’extérieur, des appels à projet laborieux pour des financements incertains.

Il n’est pas isolé ; sa démarche est encouragée, souvent facilitée par des collectivités régionales ou locales voyant dans ces expériences un espoir de développement de leur territoire. Elle l’est aussi par des groupements tels que le Pacte du Pouvoir de vivrequi unit la CFDT et 60 organisations civiques - les fabriques de transition, les PTCE, les Tiers Lieux et bien d’autres.

A chacun son rôle particulier, son terrain de choix. Il est bon de laisser se développer des formes diverses d’entraide et de renouvellement, encore faut-il, entre ces différentes démarches, des liens aussi souples qu’efficaces pour gagner en complémentarité et en émulation. Ces liens ne constitueraient pas un lieu de pouvoir, de direction, mais une entente dégageant une force de réflexion, d’échange et de communication disposant d’un site, d’une lettre, créant des évènements communs. Elle donnerait aux travaux de chaque organisation plus d’influence sur l’opinion, plus de poids sur les investisseurs publics et privés pour mener à bien la transition écologique et sociale.

Le Labo est partie prenante de ces coopérations pour un changement systémique de notre économie, une évolution positive de notre société où les conflits s’apaisent, les activités ne menacent plus les personnes et la planète. Il regroupe des acteurs de terrain et des forces vives pour construire ces récits positifs et convaincre le plus grand nombre.

Que vive la coopération, et fleurissent les initiatives de l’ESS !

   

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